vendredi 2 janvier 2009

Palestine, 2 janvier 2009 : 428 morts & 2200 blessés à Gaza, Abou Mazen out

Nous reprenons avec joie et plaisir l'excellent article de Michel Bôle-Richard, l'un des rares journalistes français en poste en Palestine occupée et auteur des meilleurs articles de la presse institutionnelle française sur la situation en Terre sainte martyre. Notre commentaire à cet article : jamais une puissance occupante n'a négocié avec ses collaborateurs, mais toujours avec ses ennemis, ceux qui lui résistent. Cette loi d'airain de l'histoire s'appliquera aussi en Palestine. Et les négociations qui finiront bien par avoir lieu entre Israël et la Résistance palestinienne, la vraie, n'auront pas lieu à Oslo, cette fois-ci.

L'attaque israélienne affaiblit Mahmoud Abbas
LE MONDE 02.01.09 13h04 • Mis à jour le 02.01.09 13h06
Jérusalem, correspondant - Près d'une semaine après le lancement de l'opération "Plomb durci", au matin du 27 décembre 2008, les autorités israéliennes semblent hésiter à lancer une offensive terrestre à l'intérieur de la bande de Gaza. Les raids aériens ont continué vendredi matin 2 janvier, et les roquettes de tomber sur le sud d'Israël. Aucun cessez-le-feu ne semble en vue. Ces jours de bombardements intensifs ont fait plus de 420 morts (selon le bilan dressé vendredi matin par des sources médicales palestiniennes), ainsi qu'une victime politique : Mahmoud Abbas, le président de l'Autorité palestinienne.
Alors que le Hamas semble loin d'avoir été mis à genoux, même si la presque-totalité de ses infrastructures a été détruite, l'interlocuteur d'Israël dans les négociations de paix se manifeste peu. Surtout, il apparaît de plus en plus discrédité aux yeux de l'opinion publique palestinienne et sa stratégie de poursuivre les négociations de paix avec l'Etat juif se révèle pour l'instant totalement illusoire.
Mahmoud Abbas s'en est bien évidemment rendu compte. A l'occasion du 44e anniversaire de la création du Fatah, son parti, il a prononcé, mercredi 31 décembre, un discours télévisé au cours duquel il a, pour la première fois, menacé de renoncer aux pourparlers de paix. "A quoi cela sert-il si les portes restent fermées ?", s'est-il emporté. "Nous ne voyons aucune utilité de poursuivre les négociations de la façon dont elles se sont déroulées jusqu'à présent", a-t-il poursuivi, estimant qu'en l'état actuel des choses, "elles offrent une caution à l'agression". M. Abbas a ajouté que si "l'agression barbare et criminelle, la colonisation et la confiscation des terres devaient se poursuivre, elles ôteraient tout sens aux négociations".
MENACES INHABITUELLES
Ces menaces sont inhabituelles dans la bouche de ce dirigeant palestinien qui a toujours voulu éviter d'apparaître comme le responsable d'une rupture même si, depuis plus d'un an, il n'a absolument rien obtenu de ses interlocuteurs israéliens. Il s'est toujours évertué de poursuivre la stratégie du dialogue qu'il prône depuis des décennies, contre vents et marées, alors que celle-ci a depuis longtemps montré ses limites. Depuis le début du processus d'Annapolis, le 27 novembre 2007, Mahmoud Abbas a été incapable de faire valoir le moindre signe de progrès.
Ses partenaires dans les négociations n'ont fait aucun geste pour asseoir sa crédibilité. Comme le dit le député du
Fatah Faisal Abushalha, rencontré à Gaza avant l'offensive du 27 décembre : "Aujourd'hui, nous sommes le dos au mur. Nous avons été très patients mais il n'y a aucun résultat et les Israéliens se jouent de nous. Pour faire la paix, il faut être deux. Nous avons fait beaucoup de sacrifices. Nous avons accepté de partager la Palestine, mais les Israéliens veulent tout ou presque pour eux."
L'opération "Plomb durci" risque donc d'enterrer complètement les maigres espoirs de paix avec les Palestiniens modérés. Juridiquement, le mandat de Mahmoud Abbas vient d'ailleurs à échéance le 9 janvier. Le Hamas a depuis longtemps affirmé qu'au-delà de cette date, le président de l'Autorité palestinienne n'aurait plus aucune légitimité. Ce qui se passe à Gaza le fait de plus en plus apparaître comme un complice objectif de l'agression contre les islamistes d'autant que les services de sécurité de l'Autorité palestinienne ont continué de faire la chasse aux islamistes en Cisjordanie.
La machine de propagande du Hamas n'a cessé, au cours des derniers jours, de montrer Mahmoud Abbas en compagnie d'
Ehoud Olmert, le premier ministre israélien, qui a juré de mener une guerre totale au Hamas. Au fur et à mesure que les jours de l'opération "Plomb durci" passent, le Mouvement de la résistance islamique s'affiche comme le fer de lance pour l'obtention des droits des Palestiniens alors que le gouvernement de Ramallah fait figure de "capitulard". Depuis le 27 décembre, Salam Fayyad, chef du gouvernement, n'a pas prononcé un seul mot qui condamne officiellement le carnage à Gaza.
En dépit de la multiplication des appels en ce sens, la réconciliation entre les deux frères ennemis que sont le Fatah et le Hamas semble de plus en plus improbable. Une médiation égyptienne destinée à rassembler les deux camps opposés, le 10 novembre 2008, a échoué en raison du refus des islamistes qui exigeaient, entre autres, la libération de leurs militants dans les prisons de la Cisjordanie. Aujourd'hui, le fossé est encore plus large. Et il n'est plus question des élections législatives et présidentielle anticipées que Mahmoud Abbas avait annoncées à la fin de l'année 2008, si le dialogue entre les deux camps n'avait pas été renoué. A six semaines d'élections israéliennes déterminantes pour le processus de paix, l'opération "Plomb durci" a pour l'instant tout balayé.
Michel Bôle-Richard

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