mardi 14 juin 2011

Une deuxième baffe pour Berlusconi

par Gorka Larrabeiti , 14/6/2011. Traduit par Fausto Giudice, Tlaxcala

Les Italiens ont rejeté massivement  le retour  à l'énergie nucléaire, la privatisation de l'eau et des services publics et l'empêchement de juger  Berlusconi et ses ministres

Grande joie en Italie, hier, quand il est apparu que le quota requis (50% plus un des électeurs inscrits) était atteint   pour valider les résultats  des quatre référendums abrogatifs  sur la gestion des services publics (eau, transports, déchets), les taux de service de l'eau, l'énergie nucléaire et les entraves légales à la possibilité de  juger le Président et les membres du  Conseil des ministres. Environ 95% des 27.500.000 électeurs  (55% du total) qui s'étaient rendus aux urnes ont voté quatre fois oui1. Un résultat  écrasant.

Il est très difficile d'atteindre le quota  lors d'un référendum abrogatif. Cela faisait 15 ans que cela ne s’était pas passé.  On dit que Fukushima a été la clé qui explique l'énorme participation des électeurs. On dit  aussi qu’il s’est agi d’un vote politique contre Berlusconi. En deux semaines, Il  Cavaliere a essuyé deux défaites électorales spectaculaires. Tout d'abord, lors des élections locales quand il a perdu des villes symboliques comme Milan et Naples. Et voilà que les Italiens lui désobéissent en masse en allant aux urnes alors qu’il les avait invités «aller à la plage » dimanche. Les ruses de Berlusconi  pour que la participation aux référendums n’atteigne pas le quota requis n’ont servi à rien. «Nous en avons marre de prendre des baffes. Maintenant, c’est nous qui allons dicter  l'ordre du jour », a averti Roberto Calderoli, ministre de la Ligue du Nord, le parti sans lequel  Berlusconii ne pourrait pas continuer à gouverner. Le gouvernement Berlusconi est chancelant, et, logiquement, les partis d'opposition exigent en bloc la démission de l'actuel président du Conseil et la convocation immédiate d’élections politiques.


Mais la signification de cette victoire va au-delà de l’immédiateté et de l’actualité  politiques de la baffe à Berlusconi ou ou du déclin du berlusconisme, et cela  pour deux raisons. Premièrement, parce que c'est un triomphe d'un référendum promu par le bas, sans autre moyen que la mobilisation populaire dans les réseaux sociaux et dans les rues. Il est vrai que le parti  Italie des Valeurs s’était fait le promoteur de la collecte des signatures nécessaires pour obtenir un référendum, mais ce sont  les mouvement pour l'eau publique et contre l'énergie nucléaire qui se sont mobilisés les premiers. Deuxièmement, parce que ce qui était en jeu, à savoir l'eau, l'énergie, l'environnement et la justice sont des biens publics qui appartiennent à tout le monde car ils ne sont à personne, et une majorité transversale a décidé qu’ils devaient le rester. Ce référendum révèle le désir de participer, d’échapper à l'égoïsme, et de revenir au commun. Nichi Vendola, chef de file du parti Gauche, écologie et liberté, (SEL) résume ainsi la situation actuelle: «Aujourd'hui, c’est l'Italie des biens communs qui gagne et celle des lobbys qui perd .»
 
Selon Giuseppe di Rita (2), président de CENSIS (Centre d'Études en Investissement Social), une fondation qui publie un rapport annuel socio-économique sur l'Etat italien, 'un cycle politique fondé sur la subjectivité qui a commencé dans les années 60 et a atteint son apogée avec Berlusconi est en train de se refermer. Un cycle qui a produit un «malaise social» dans cette dernière phase, parce que la société s’éloigne du modèle  "tout est à moi" et recommence à se réunir, à s’agréger. Le « je », axe du libéralisme qui prétend encore dominer le monde, est en train de cesser d’être le centre du monde car il ne fait que conduire à " des formes d’agressivité diffuse ou automutilante (anorexie, boulimie, consommation de drogues). Et à des situations familiales exaspérante, à des crimes et délits violents."
 
Di Rita dit: «Aujourd'hui, on commence à percevoir que solitude et l'individualisme ne sont pas une aventure de puissance, mais de dépression. Le dérèglement des pulsions est un produit de l'égocentrisme, d’une culture qui fait du moi le principe du monde, et de plus dans la une phase où la reconnaissance sociale se raréfie."
 
Et tandis que Berlusconi, qui a reçu hier Nétanyahou, continuait à faire des blagues sur le Bunga Bunga, pour essayer de détourner l'attention de la défaite et la centrer à nouveau sur sa personne, l'Italie nous a donné une grande joie. L’ère du « moi-moi-moi » prend fin. Le « nous » est de retour.
Notes
1. Pour voir les chiffres exacts
2. Ida Dominijanni, entretien avec Giuseppe di Rita. "Il lento sipario sulla Seconda Repubblica", Il Manifesto, 8-6-2011, p.7.

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