mardi 22 avril 2014

Les bons, le brut et les truands - Brève mise au point sur la situation actuelle au Venezuela

Par , et , mouvements, 15/4/2014
Après le triomphe apparent du chavisme aux élections municipales du 9 décembre, la guerre politique intermittente qui a ponctué ces 15 années de « Révolution bolivarienne » – elle-même consécutive à une décennie de guerre sociale – occupe à nouveau le devant de la scène : des dizaines de milliers de manifestants et émeutiers réclament depuis bientôt deux mois la « sortie » du président Nicolás Maduro. La marche de Caracas du 12 février, au carrefour des mobilisations étudiantes « contre l'insécurité » initiées à San Cristóbal et des appels à « incendier la rue » lancés par la frange la plus réactionnaire de l'opposition le 23 janvier (date symbolique de la naissance de la démocratie en 1958)ii, a inauguré un cycle d'assassinats et de représailles débouchant sur l'arrestation d'un des leaders et de deux maires de la coalition d’opposition (MUDiii), en sus de l'occupation militaire de deux régions frontalières de la Colombie. Qu'y a-t-il derrière les stéréotypes croisés d'une opposition « fasciste » aux prises avec un pouvoir d'État « castro-communiste » ? Qui sont les manifestants ? Que fait le gouvernement ? Sur fond de crise économique et de violences politiques et sociales qui semblent combler des chroniqueurs pressés d'enterrer une énième « révolution ratée », et alors que se profile une médiation internationale (avec l'UNASUR et le Vatican), voici un panorama de la situation en trois temps, en contre-points des principaux poncifs circulant de part et d'autre.

« Un coup d'État se trame » vs. « le chavisme assassine des manifestants pacifiques »

L’opposition vénézuélienne est hétérogène et divisée sur la stratégie à suivre, en présence d'un mouvement dispersé et centrifuge. D’un côté, le dirigeant du parti Voluntad Popular Leopoldo López, la députée de Caracas María Corina Machado et le maire du Grand Caracas Antonio Ledezma sont devenues les figures politiques les plus médiatisées des protestations, en invoquant d'emblée « la sortie » de Maduro. De l'autre, le candidat unique de la MUD aux présidentielles d’octobre 2012 et avril 2013, Henrique Capriles Radonsky, a répété que croire que Nicolás Maduro pouvait quitter la présidence sous la seule pression des manifestants était « une grande erreur » et que tout changement institutionnel devait passer par la voie électorale. Or la Constitution imposerait d’attendre 2016 pour un potentiel référendum révocatoire, dans l’hypothèse où l’opposition réunirait les signatures d’un cinquième des électeurs inscrits.

La tentation de l'affrontement demeurant latente, les velléités insurrectionnelles de cette opposition ne doivent pas être minorées mais appréciées à leur juste valeur. La violence des actions de rue – les guarimbas, des barricades dans des quartiers essentiellement résidentiels et aisés, tenus par des maires d’opposition –, menées à la fois en marge et en lieu et place des manifestations, fait clairement écho aux postures guerrières des « faucons », aux États-Unis ou en Colombie (autour de l’ex-président Álvaro Uribe). S'il s'en désolidarise, Capriles, affaibli par la défaite de la MUD aux municipales, a également refusé l'invitation à la Conférence pour la Paix, convoquée par Maduro pour enrayer la spirale de la violence, et réclame la libération inconditionnelle de ses homologues, mais aussi d'Iván Simonovis, ex-commissaire impliqué dans le coup d'État (avorté) contre Chávez d'avril 2002iv. Lire la suite

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire